Une interview exclusive avec Mr. Tongue
Le Corée Voyage Show consacre sa première partie "boulègue" à une interview de l'artiste graffeur Mr. Tongue, célèbre pour ses dessins de langues sur les murs de Corée. Ses oeuvres traversent même les eaux et s'affichent jusqu'en Amérique.
Venez découvrir cet artiste hors du commun qui partage ses expériences, son travail, en abordant aussi des sujets sensibles qui nous concernent tous.
En fin d'émission, nous vous présentons un quartier incontournable de Séoul : Insadong. Petit quartier situé près du quartier historique de Séoul, laissez-vous porter par l'histoire de ce coin aux multiples facettes.
Liens mentionnés dans cet épisode :
- Exposition à la galerie "Ecorock"
Photos by @mysturtongue
[00:22] Félix : Allez, on est dans un nouvel épisode du Corée Voyage Show. Aujourd’hui, j’ai la chance d’être en compagnie d’une équipe de choc ; entre autres, Jeanne qui est avec nous, alias Jane pour les intimes. Alors, la forme Jeanne ?
Jeanne : Ça va, ça va, nickel. Et toi Félix ?
Félix : Ça va bien, ça va bien, la pêche. Alors, aujourd’hui, on a un format un peu particulier. Vas-y Jeanne, balance la sauce et dis-nous ce qui nous attend.
[00:39] Jeanne : On a aujourd’hui le plaisir d’accueillir un invité de marque dans une rubrique appelée « Boulègue ». Alors, comme d’habitude, on va avoir besoin de précision sur ce terme « Boulègue ». Qu’est-ce que ça veut dire Félix ?
Félix : Oui alors, « Boulègue », c’est de l’occitan. Du verbe bouléguer qui veut dire bouger, mélanger ou secouer et j’ai choisi ce titre pour cette rubrique consacrée aux interviews parce que l’objectif c’est de faire bouger les choses, de secouer l’esprit de celles et ceux qui nous écoutent et donc de bouléguer certaines idées reçues et/ou opinions toutes faites - y compris les miennes - qu’on peut avoir sur un sujet. Alors, petite parenthèse personnelle, ça me rappelle aussi quand j’étais petit et que j’allais au loto du village où vous savez, vous avez votre carton avec les numéros, le maïs pour marquer les numéros, à l’ancienne et la personne sur une estrade qui tire les numéros et lorsque vos numéros ne sortent pas et que c’est toujours les mêmes numéros qui sortent, on peut crier « Boulègue ! » donc « mélange ! » pour espérer gagner un filet garni ou une oie bien grasse. Bon là, pour ceux qui ont grandi en ville et qui ont jamais vécu à la campagne, ils doivent se dire mais « Qué saquo lo bestio », qu’est-ce qui me raconte celui-là qu’il retourne dans sa ferme. Mais voilà, vous savez désormais ce que veut dire « Boulègue ».
Jeanne : Après cette partie interview, on vous amènera dans un quartier incontournable de Séoul.
Félix : Mais encore merci Jeanne pour ce très joli programme. Et on commence donc avec notre rubrique « Boulègue ».
[02:00] Félix : Allez Jeanne, je te laisse présenter notre invité.
Jeanne : Aujourd’hui, nous avons un invité spécial avec nous. Si vous avez déjà visité la Corée, vous avez peut-être remarqué quelques langues dessinées sur les murs. Oui, oui, j’ai bien dit quelques langues. On accueille aujourd’hui leur créateur, Mister Tongue ou Monsieur Langue donc en français. C’est logique. C’est un artiste grapheur reconnu qui a un intéressant bagage et on va voir tout ça avec lui maintenant.
Félix : Allez, c’est parti. Comment ça va Mr Tongue ?
Mr Tongue en anglais
Traduction Jeanne : Salut je vais bien, merci de m’avoir invité. C’est un honneur d’être ici.
[02:33] Félix : Alors, est-ce que tu pourrais nous en dire un peu plus sur toi ? Ou tu as grandi, ton histoire…
Mr Tongue en anglais
[02:55] Traduction Jeanne : J’ai grandi aux Etats-Unis, sur la côte Est et la côte Ouest. Je suis venu en Corée il y a 8/9 ans pour raisons personnelles, pour ma famille mais depuis je fais des aller-retours, je suis jamais trop resté ici.
Mr Tongue en anglais
[03:28] Traduction Jeanne : En fait, c’est à New York que j’ai commencé ma carrière. J’ai vécu dans plusieurs parties des Etats-Unis, mais New York, c’est l’endroit où j’ai débuté en tant que Mr Tongue où j’ai créé le personnage.
Mr Tongue en anglais
[03:50] Traduction Jeanne : J’ai toujours été intéressé par la culture de la rue. J’ai commencé à faire du skate-board dès l’école primaire, du break-dance. J’ai toujours dessiné depuis que je suis tout petit mais je n’ai jamais pensé que ça pouvait être une carrière.
Mr Tongue en anglais
[04:28] Traduction Jeanne : J’ai été exposé au graffiti au collège et j’ai commencé à en voir beaucoup quand j’étais à LA, à Los Angeles. Tous les stickers, les posters, les pochoirs attiraient mon attention quand j’habitais là-bas. Et j’ai juste continué sur ce chemin, j’en ai fait un hobby pendant un long moment. Ensuite, quand j’ai déménagé à New York, j’ai pris la décision de faire des graffitis ma carrière.
[04:48] Félix : Comment as-tu commencé le graffiti et qu’est-ce qui t’attirait là-dedans ?
Mr Tongue en anglais
[05:38] Traduction Jeanne : J’aime le fait que c’est un art public et dans le temps, l’art public, l’art de rue était vraiment quelque chose. Ce n’était pas un genre donc quand je vois des graffitis partout, sur les buildings, sur les sites en construction, comment les artistes utilisent les lettres, les couleurs et les personnages comme moyen d’expression illégal, en général pendant la nuit. Ce mode de vie, ces techniques et aussi cet état d’esprit ont vraiment attiré mon attention. Le fait que certains noms revenaient systématiquement quand je conduis sur l’autoroute ou quand je suis dans le quartier et quand je les vois et je me dis, mais quand est-ce qu’ils ont fait ça ? C’est ça qui, au départ a vraiment attiré mon attention.
Mr Tongue en anglais
Felix en anglais
[06:32] Traduction Jeanne : Puis, j’ai eu des amis qui étaient très intéressés par le graffiti et le street art. C’est à ce moment que je me suis dit, ok, je devrais peut-être essayer de faire Mr Tongue mais j’avais un autre pseudo à cette l’époque.
Mr Tongue en anglais
[06:58] Traduction Jeanne : Je trouvais que je n’avais pas beaucoup de talent pour faire du lettrage. Ça vient tout seul pour certaines personnes, mais mes lettres ressemblaient à du gribouillage sur les murs donc je n’ai développé aucun réel intérêt pour ce style.
[07:08] Félix : Alors pourrais-tu expliquer ce qu’est le graffiti ? Tu viens de parler du lettrage par exemple qui est le fait d’écrire sur les murs dans un style particulier.
Mr Tongue en anglais
[07:52] Traduction Felix : De nombreuses personnes ont des opinions différentes sur ce qu’est le graffiti. Certains vont dire, le graffiti doit être fait de manière illégale, d’autres diront, c’est du vandalisme, d’autres que c’est juste une fresque murale. Les gens qui ne savent pas vraiment vont dire, si tu peins avec une bombe, t’es un graffeur mais si tu peins avec un pinceau, tu es un artiste peintre. Tu es défini par ce que tu utilises mais j’ai l’impression que le graffiti, c’est plus un état d’esprit. Ça, c’est mon opinion personnelle. D’autres personnes auront d’autres avis.
Mr Tongue en anglais
[09:00] Traduction Jeanne : Mais une chose est sûre, je sais que le graffiti est un art public et on ne peut pas lui enlever ça. Certaines galeries font la promotion d’artistes qui utilisent de la peinture aérosol ne serait-ce que sur une toute petite partie de leurs œuvres et ils vont dire « Oh, c’est un graffeur » alors que non, ils utilisent juste des bombes comme un moyen, comme un ustensile. Donc c’est surtout un art public mais ça peut être aussi associé à du vandalisme ou une pratique illégale faite de nuit comme les tags, des représentations, des fresques sur des murs entiers mais les graffitis ont commencé avec du lettrage. La plupart des artistes « old school » définissent le graffiti par des lettres en mélangeant les différentes lettres et couleurs, renforcées par des personnages pour compléter leur art.
[09:39] Félix : Le graffiti est donc pour toi une philosophie, une façon de penser ?
Mr Tongue en anglais
[10:05] Traduction Jeanne : Oui, c’est plus une mentalité pour moi, c’est devenu une part de moi à tel point que je ne pense qu’à ça même inconsciemment : quand je me promène, je regarde toujours les murs. Les gens regardent les panneaux publicitaires, les bus, les buildings, moi je cherche juste les pans de murs vides, c’est tout ce que je cherche tout le temps, c’est devenu une partie de ma vie.
[10:22] Félix : En fait, que tu peignes sur un mur avec une bombe aérosol, ou avec tes mains ou avec un pinceau, on te considère comme un graffeur, c’est ça ?
Mr Tongue en anglais
[11:07] Traduction Felix : Si tu es reconnu en tant qu’artiste de graffiti, alors après ça, tu peux peindre avec un pinceau sur un tableau, tu resteras un graffeur. Tu essaies juste quelque chose de différent. Quand l’art de rue est arrivé avec toute sa culture, c’était surtout des pochoirs et des collages, je suis sûr que la France a beaucoup de collage comme ceux de Shepard Ferry ou ceux de JR. Ces mecs ont vraiment défini le street art en tant que tel. Je pense que le street art, c’est juste une forme d’art de rue qui utilise des ustensiles différents. Le graffiti renvoie plus à la peinture aérosol.
[11:34] Jeanne : Et quelles sont tes sources d’inspiration ? Pourquoi tu peins, tu dessines une langue ? C’est plutôt inhabituel comme dessin…
Mr Tongue en anglais
[12:15] Traduction Jeanne : Alors, ma source principal d’inspiration, c’est la nature. C’est très intéressant car c’est toujours différent. Les couleurs que j’utilise quand je peins me sont souvent inspirées par ce que je vois dans la nature. Je travaille surtout avec des couleurs pastels et j’ai l’impression que le pastel touche tous les âges et tous les genres. Si quelque chose est trop fluorescent, ça peut ressortir trop violemment ou si c’est trop foncé, ça peut être trop dur. Mais le pastel, des enfants jusqu’aux personnes âgées, tout le monde peut apprécier.
Mr Tongue en anglais
[13:17] Traduction Felix : Je suis aussi un artiste chrétien donc je m’inspire beaucoup de la Bible. C’est ironique car de nombreuses personnes me demandent : « Oh, tu fais du vandalisme, tu fais de graffiti, comment peux-tu dire que tu es chrétien ? ». J’ai débattu des années sur ça avec différentes personnes mais je suis à présent en paix avec moi-même et j’ai ma propre compréhension de qui est Dieu. J’ai mes propres réponses et mes propres raisons. A part ça, je m’inspire d’autres artistes que je suis sur Instagram. Ils sont une de mes principales sources d’inspiration.
Mr Tongue en anglais
[14:16] Traduction Jeanne : Mais pour en venir aux langues, pourquoi des langues ? Je vais essayer de la faire courte, mais quand j’étais à New York, j’ai eu beaucoup de hauts et de bas, mais surtout des bas. Que ça soit financièrement parlant ou émotionnellement, mentalement, physiquement aussi et j’ai dû laisser tomber beaucoup de mes loisirs comme faire du vélo, du B-Boy ou du skate. Pour moi, mes hobbies sont très importants, ça m’empêche de devenir fou donc je devais continuer l’un d’entre eux le graffiti.
Mr Tongue en anglais
[14:46] Traduction Felix : Je ne pouvais pas faire de graffiti avec du lettrage car la peinture coûtait trop chèr.
Mr Tongue en anglais
[15:05] Traduction Felix : C’est à ce moment-là que l’artiste Shepard Ferry est devenu connu, … était quant à lui déjà célèbre, JR et … menaient une campagne artistique à New York. Le street art était en plein essor même si c’est un art qui existait déjà depuis longtemps.
Mr Tongue en anglais
[15:24] Traduction Felix : Alors je suis tombé un peu plus dans le street art et j’ai réalisé qu’on pouvait mettre du sens dans sa vie à travers cet art.
Mr Tongue en anglais
[16:06] Traduction Felix : Comme j’étais à un moment difficile de ma vie, je voulais m’exprimer au monde entier. Je réfléchissais aux différents moyens d’expression qui existaient et le 1er qui me vint à l’esprit fut des parties du visage comme les yeux, la bouche, le nez, les oreilles mais aucun de ces éléments ne me convenaient. J’ai finalement opté pour la langue. Au début, j’ai dessiné une langue sur une carte postale ou des post-it que j’ai commencé à coller sur mon ordinateur, sur mon frigo, sur ma télé. C’était juste une langue mais on m’a dit que c’était un visage qui me regardait avec une expression particulière. C’est à ce moment que j’ai décidé, Allez, ok, je vais faire des langues.
Mr Tongue en anglais
[16:41] Traduction Jeanne : Est-ce que je devrais parler de la signification de la langue aussi ? Parce que j’ai 8, 10 significations, ça peut être long.
[16:50] Félix : Oui oui, c’est parti !
Mr Tongue en anglais
[17:06] Traduction Jeanne : Après avoir décidé de dessiner des langues, comme je n’aime pas travailler sans qu’il y ait de sens derrière, j’ai cherché sur Google quel symbole la langue représente. L’une des choses que j’ai trouvée est le fait que la langue est un des muscles les plus forts du corps.
Mr Tongue en anglais
[17:41] Traduction Jeanne : Je voulais que ma langue soit une force pour moi, au fil des ans. Un autre fait est qu’on ne peut pas faire l’amour sans langue. C’est pour ça qu’on parle du « French kiss » n’est-ce pas ? C’est marrant d’ailleurs de parler de ça dans un Podcast français. Enfin bon, j’ai utilisé ma langue pour répandre l’amour dans le monde. Sans langue, on ne peut pas parler comme on est en train de le faire maintenant. Je voulais parler au monde à travers ma langue.
Mr Tongue en anglais
[18:22] Traduction Felix : Sans langue, on n’a pas de goût donc je voulais goûter le monde avec ma langue. En parlant de goût, on sait que tout le monde aime manger et quand on mange, cela nous procure une certaine joie. Quand les gens voient mes langues dans les rues, je veux qu’ils prennent du plaisir comme quand ils mangent.
Mr Tongue en anglais
[18:56] Traduction Felix : Une autre raison, c’est que sans langue, on ne peut pas digérer la nourriture grâce à sa salive et quand la vie inflige des choses difficiles et du stress, de la frustration, j’utilise ma langue pour digérer toutes ces informations et je donc commence à créer, à peindre pour évacuer le stress. Pour moi, c’est une forme de digestion mentale.
Mr Tongue en anglais
[19:42] Traduction Felix : Et la dernière raison est que quand j’ai regardé dans la Bible, je me souvenais qu’on y parlait de glossolalie et quand j’ai cherché plus en détail, j’ai trouvé beaucoup de passages parlant de langue dans la Bible mais l’une des choses qui m’a le plus marquée, c’est que la glossolalie est un cadeau de Dieu. C’est une conversation qu’on a directement avec Dieu et que personne d’autre ne comprend et ça, ça a vraiment attiré mon attention. Si je ne vous avais pas expliqué pourquoi j’avais décidé de dessiner des langues, personne n’aurait compris.
[20:05] Jeanne : Oui c’est vrai que ça fait plusieurs années que je vois tes langues sur les murs et je n’aurais jamais imaginé toutes ces significations.
Mr Tongue en anglais
[20:21] Traduction Jeanne : Oui, c’est un graffiti très simple. Tu sais, dans tous les dessins, les designs, la clé, c’est la simplicité. Comme les logos de Nike, Adidas, ils sont très simples et c’est pour ça qu’ils attirent l’attention. C’est ce que je voulais aussi.
[20:33] Félix : En fait, pour la 1ère fois que j’ai vu tes dessins, je pensais que ça faisait référence au terme coréen "Melong" 메롱, tu sais quand les enfants font des grimaces et tirent la langue et disent "Melong" 메롱.
Mr Tongue en anglais
[21:11] Traduction Felix : C’est marrant que tu mentionnes ça parce que les gens m’envoient des messages en me demandant : est-ce que MR ça veut dire "Melong" 메롱 en coréen ? Je leur dis, non, c’est mister donc en Corée, on m’appelle souvent Mister Melong. Pour revenir encore une fois sur tes sources d’inspiration, où est-ce que tu vas pour t’inspirer de la nature ?
Mr Tongue en anglais
[22:14] Traduction Felix : Alors, je procède de 3 manières différentes pour arriver à combler ce vide. D’abord, quand je ne peux pas me déplacer, je regarde des photos sur mon téléphone grâce à des personnes que je suis sur Instagram qui ont des pages dédiées à des photos de paysages. Ensuite, je vais dans des parcs, des lacs ou bien je me promène le long du fleuve Han pour arriver à m’évader et enfin, je voyage à travers le pays pour me remplir l’esprit de sources d’inspiration naturelles. J’ai toujours grandi entouré de la nature, même si je suis un citadin. Par exemple, à New York, j’allais souvent à Central Park ou près du fleuve Hutson.
[22:41] Jeanne : A propos de ça, quel est ton endroit préféré en Corée ?
Mr Tongue en anglais
[23:04] Traduction Jeanne : Par rapport à la nature, je dirais, j’adore Yang Yang 양양, la côte pour le surf ou l’île de Jeju juste parce que c’est très paisible. Il y a beaucoup de monde, mais si on oublie un peu les gens, on peut avoir son propre sentiment de paix. L’eau m’inspire beaucoup également, les grandes étendues d’eau comme le fleuve Han, les grands lacs, l’océan.
[23:24] Félix : Prochaine question, y a-t-il des différences entre le graffiti en Corée et le graffiti aux Etats-Unis ?
Mr Tongue en anglais
[24:10] Traduction Felix : Alors, oui et non. Oui car aux Etats-Unis, la culture du graffiti est omniprésente. Les gens te respectent même s’ils ne te connaissent pas parce que c’est aussi un très grand pays. C’est plus une question de savoir si tu fais du graffiti ou pas, si tu vis ce style de vie ou pas. En Corée, par contre, l’art de rue occupe une place moins importante et on fait donc plus attention aux concepts de : est-ce que tu es un bon graffeur ou est-ce que tu as une bonne technique ou quand est-ce que tu as commencé le graffiti. Je pense que c’est juste lié à des différences culturelles. Les points communs quant à eux sont des styles similaires avec une variété de styles aussi bien en Corée qu’aux Etats-Unis.
[24:43] Jeanne : En Corée, il n’y a pas de graffiti lié aux guerres de gangs, lié leur territorialité ou à la violence qu’on retrouve notamment en Amérique mais il existe une approche plus sociale, peut-être plus politique. Quels sujets de société et/ou messages politiques veux-tu faire passer à travers ton art ?
Mr Tongue en anglais
Traduction Jeanne : Pour ce qui est de l’aspect social, cela est lié aux raisons pour lesquelles j’ai débuté dans le graffiti et pourquoi j’ai décidé de dessiner une langue. Je veux que les gens apprécient la vie et qu’ils se sentent heureux lorsqu’ils contemplent les couleurs de mes graffitis, les différents styles et les endroits inattendus où je dessine.
Mr Tongue en anglais
[26:19] Traduction Jeanne : Au niveau politique, je ne suis pas un artiste engagé, mais je soutiens depuis pas très longtemps, le mouvement Black lives matter particulièrement quand j’ai été moi-même victime du racisme quand je vivais aux Etats-Unis. J’ai connu les insultes verbales, j’ai fait l’objet d’attaques racistes lorsque j’étais très jeune et je ne peux même pas imaginer ce que a peut être pour les noirs américains qui subissent cela depuis qu’ils sont arrivés en Amérique. Même si je ne vis pas actuellement aux Etats-Unis, je pense que c’est un mouvement global et j’essaie seulement d’y contribuer à mon échelle. C’est vraiment le seul sujet sur lequel je suis engagé et seulement depuis peu de temps. Habituellement, je n’aime pas trop exprimer d’opinion politique à travers mon art.
[26:55] Félix : Je me demandais quand est-ce que tu avais été exposé au racisme pour la 1ère fois ?
Mr Tongue en anglais
[27:14] Traduction Jeanne : C’était en 1997, je m’en souviens encore et cela venait de mes camarades de classe au primaire. Par la suite, j’ai vécu cela pratiquement tous les ans.
[27:22] Félix : J’aimerais rebondir par rapport à cela car à mon avis, en France et en Europe, les gens associent de manière générale l’Amérique à un pays assez ouvert et assez racialement conscient, j’aurais tendance à penser qu’il y a moins de racisme aux Etats-unis qu’en France. Même si il est évident qu’une grande partie de l’Amérique reste raciste surtout quand on s’éloigne des côtes. De mon côté, je ne suis pas surpris d’entendre ton histoire et je trouve ça très intéressant. Est-ce que cela a eu un lien avec ta période difficile que tu traversais lorsque tu étais à New York ?
p>Mr Tongue en anglais[27:58] Traduction Felix : En fait, c’est à New York où j’ai été le moins exposé au racisme. Les raisons de cette lutte intérieure à laquelle je faisais face lorsque j’étais à New York étaient plutôt d’ordre personnel.
[28:07] Jeanne : On a pu voir 2 de tes graffitis mettant en avant le mouvement Black lives matter. L’un est plutôt coloré, l’autre représente un personnage de dessin animé "Hey Arnold". Peux-tu nous en dire plus sur ce personnage car je crois que son meilleur ami Gérald est afro-américain.
Mr Tongue en anglais
[28:38] Traduction Jeanne : Oui, c’est pour cela que j’ai choisi ce personnage. J’ai grandi en regardant ce dessin animé et "Hey Arnold" sur la chaîne de télé américaine "Nickelodeon". Tous les jours, mes amis et moi en parlions. C’était un peu comme si on parlait de la série "Game of Thrones" mais il y a plus de 10 ans.
Mr Tongue en anglais
[29:22] Traduction Jeanne : J’adorais le fait qu’il était toujours entouré d’amis très divers venant d’ethnies variées allant de la fille asiatique, à la fille blanche, au garçon roux grassouillet, au garçon noir avec une coiffure afro. Il traînait toujours dans la rue, sur des marches d’escaliers mais j’aimais bien cet aspect quotidien de la vie.
Mr Tongue en anglais
[30:20] Traduction Jeanne : L’année dernière, j’ai commencé un projet appelé « Select Seven » dans lequel je choisis 7 personnages de dessins animés que je représente à travers le monde en utilisant des posters. Cette année, j’en suis à 2 et Hey Arnold est 1 des 2 personnages. J’ai choisi Hey Arnold car son meilleur ami Gerald comme tu l’as mentionné est noir. J’ai le sentiment que si on sortait de nouveaux épisodes de ce dessin animé, cela aurait un impact sur le mouvement BLM Black Lives Matter. C’est pour cela que j’associe Hey Arnold à ma manière, dans la rue, au mouvement à une échelle globale.
[30:52] Félix : Aux Etats-Unis, est-ce que ton groupe d’amis venaient aussi d’horizons différents, avec des racines différentes ? Ou peut-être également en Corée ?
Mr Tongue en anglais
[31:18] Traduction Felix : En Amérique, j’avais beaucoup d’amis proches hispaniques, noirs ou chinois. Quand je suis arrivé en Corée, du fait que je sois étranger, j’ai eu l’opportunité d’être en contact avec des personnes d’ethnies différentes, plus que si j’étais un coréen qui avait grandi en Corée.
[31:31] Jeanne : Est-ce que tu te considères comme étranger en Corée ?
Mr Tongue en anglais
[31:51] Traduction Jeanne : Oui car je ne peux pas changer ma façon de penser, ma personnalité s’est entièrement construite en grandissant aux Etats-Unis.
[31:57] Félix : Pour en revenir au mouvement BLM, est-ce que cela est suivi en Corée ? Parmi tes amis américains qui vivent en Corée, ton entourage peut-être ?
Mr Tongue en anglais
[32:14] Traduction Jeanne : Je sais qu’il y a eu une manifestation en Corée, mais le gouvernement y a rapidement mis fin.
Mr Tongue en anglais
[32:50] Traduction Felix : Après avoir posté certains graffitis sur mes réseaux sociaux liés au mouvement BLM, Black Lives Matter (les Vies Noires Comptent), j’ai reçu des messages comme « Tu penses pas que toutes les vies comptent ? ». Bien sûr que toutes les vies comptent mais on n’a pas été racialement opprimés comme les Noirs l’ont été. Personnellement et ayant été victime du racisme, je pense que cela aurait pu arriver à n’importe lequel d’entre nous. Mais la raison qu’on met tant en avant ce mouvement de Black Lives Matter, les Vies Noires Comptent, c’est que les noirs se font assassiner publiquement
[33:32] Jeanne : Pour revenir sur le sujet des 7 personnages de dessins animés, pourquoi avoir choisi le chiffre 7 et quels sont ces personnages ?
Mr Tongue en anglais
[34:18] Traduction Jeanne : Dans la bible, le chiffre 7 représente la perfection, l’achèvement. Par ailleurs, je choisis les personnages en fonction de mon humeur et qui me sont familiers avec lesquels j’ai grandi. En début d’année, le 1er personnage que j’ai choisi, c’est Stimpy et parce que je voulais choisir un personnage très différent, je me suis tourné vers Hey Arnold pour le choix de mon 2nd personnage. J’évite aussi les personnages trop vulgaires ainsi que les personnages de Disney car ils sont à mon sens trop communs.
[34:42] Jeanne : Il existe en Corée de plus en plus de festivals dédiés au graffitis et des lieux où le graffiti est autorisé. Qu’en penses-tu ?
Mr Tongue en anglais
[35:39] Traduction Jeanne : Je pense que c’est une bonne chose et qu’il devait y en avoir plus. C’est bien que des événements organisés par le gouvernement et des entreprises existent et donnent au graffiti une image branchée. Par contre, je sais aussi qu’on utilise les artistes à des fins commerciales. Comme le graffiti n’est pas démocratisé en Corée, les entreprises et clients sollicitent ces artistes, les approchent comme si c’était eux qui leur rendaient service. Cela n’arrive pas à chaque fois, mais cela reste néanmoins très fréquent. J’ai eu plusieurs retours négatifs de la part d’artistes que je connais. Cela leur a fait évidemment de la pub, mais en contre partie, ils n’ont pas eu l’impression d’être impliqués au centre du projet artistique.
Mr Tongue en anglais
[36:26] Traduction Felix : Je suis pour qu’il y ait plus d’espaces dédiés aux graffitis car on commence à voir des horaires imposés dans certains tunnels. On voit aussi disparaître pas mal de tunnels où on pouvait graffer avant.
Mr Tongue en anglais
[37:01] Traduction Felix : Avant la crise sanitaire, des graffeurs du monde entier qu’ils soient célèbres ou moins connus venaient souvent en Corée et c’était vraiment rafraîchissant de voir de nouveaux styles et manières de s’exprimer. Imagine, c’est génial de voir le travail d’un artiste que tu suis depuis des années atterrir sur 1 de tes murs.
Mr Tongue en anglais
[37:35] Traduction Felix : Sinon, je trouve ça très bien d’avoir une influence qui vient de l’étranger. Pour ma part, j’ai eu la chance de tagger avec des artistes venant d’autres pays qui m’ont contacté lors de leur passage en Corée dont en fait, une française qui s’appelle Marquise.
[37:46] Jeanne : Que ressens-tu lorsque un de tes graffitis est recouvert par un autre graffiti ?
Mr Tongue en anglais
[38:43] Traduction Jeanne : Ça craint mais on peut rien faire car il faut accepter qu’on se trouve dans un espace d’expression commun. Tu peux bien sûr retoucher ton graffiti ou bien le laisser tel qu’il est. Il y a une règle tacite dont on ne parle pas dans la rue qui est ne pas tagger sur le travail d’un autre artiste. Quand on parle de travail, on fait référence à ce qu’on appelle dans le jargon un Burner ou une pièce, une fresque ou un travail professionnel qui prend au moins 3 ou 4 heures de travail.
[39:08] Félix : Allez Jeanne, on passe à la question suivante.
Jeanne : Comment aimerais-tu voir la culture du graffiti évoluer en Corée ?
Mr Tongue en anglais
[40:20] Traduction Jeanne : J’aimerais que la 1ère génération d’artistes coréens puissent aider la jeune génération. Malheureusement, la communauté n’est pas assez importante et les jeunes artistes qui sont au lycée ou à l’université n’osent pas approcher et demander conseil auprès de ceux qui ont plus de 40 ans. Je pense qu’il existe un vrai fossé des générations. Avant, tout le monde s’investissait beaucoup dans la communauté du graffiti, mais petit à petit, à cause de différents personnels, politiques ou autre, tout a éclaté et les jeunes se sont trouvés isolés. J’aimerais que cette jeune génération d’artistes soit nourrie par les plus grands mais cela doit venir d’un mouvement collectif.
Mr Tongue en anglais
[41:14] Traduction Felix : Au sujet de ma carrière, je compte rester un artiste de graffiti jusqu’à ma mort. Je plaisante souvent avec mes amis et leur dis que si je deviens un papi en fauteuil roulant, j’aurais un petit panier pour y mettre mes bombes à tagger.
[41:23] Jeanne : L’année dernière, tu t’es lancé un défi celui de dessiner 1000 langues, 100 langues… Non, 1000… C’était 1000 langues. Comment t’es venue l’idée et pourquoi le chiffre 1000 ?
Mr Tongue en anglais
[42:10] Traduction Felix : D’abord, je trouve ça intéressant que tu pensais qu’il ne s’agissait que de 100 langues. Au début, je m’étais fixé 300 comme objectif, mais après avoir regardé les 365 jours du calendrier, je me suis dit que ça n’avait pas de sens d’en faire si peu. Ensuite, je suis passé à 700 car on retrouve le chiffre 7 et en fin de compte, un ami m’a dit, si tu pars pour 700, pourquoi pas aller jusqu’à 1000.
Mr Tongue en anglais
[42:57] Traduction Felix : C’est là que c’est devenu un vrai challenge. J’ai dû y travailler presque toutes les nuits pendant 1 an. En réalité, je n’ai eu que 7 mois pour réaliser 1000 langues en Corée car je suis parti à l’étranger pendant 5 mois l’année dernière. En fait, j’ai du en faire un peu plus de 1000.
Mr Tongue en anglais
[44:07] Traduction Jeanne : J’avais le sentiment que pour atteindre certains objectifs que je m’étais fixés, je devais absolument me surpasser. Je crois qu’on a besoin de se lancer des défis, pas seulement dans le milieu du graffiti mais aussi dans la vie de tous les jours. Dans la vie, je crois que tu perds ton temps si tu ne progresses pas. Que ça soit mentalement, spirituellement, physiquement ou autre, il faut toujours essayer d’être meilleur que la veille. Certains me demandent « Tu recommences l’année prochaine ? » et je leur répond « Euh, non je crois pas car c’est physiquement éprouvant ». Je ne dessine pas que les contours et les lignes d’une langue et puis c’est tout. Je passe vraiment du temps sur chaque graffiti. C’était une bonne expérience et cela m’a permis de parcourir la Corée entière.
[44:45] Félix : Quel sera donc ton prochain défi ?
Mr Tongue en anglais
[45:08] Traduction Jeanne : Je ne sais pas si on peut appeler ça un défi car si c’est le cas, ça doit être quelque chose que les gens considèrent aussi comme un défi mais je travaille sur un projet depuis quelque temps mais je ne veux pas en dire plus pour le moment. Je peux juste vous dire que c’est quelque chose qui n’a jamais été fait en Corée.
[45:24] Félix : Mais cela implique bien des langues ?
Mr Tongue en anglais
[45:56] Traduction Jeanne : Je serai le 1er à le faire et dans ce sens-là, c’est vrai qu’on peut appeler ça un challenge. J’aimerais briser les idées reçues que les gens ont sur moi. C’est un projet personnel et ce n’est pas une collaboration.
[46:07] Félix : Bon alors, maintenant, je veux vraiment savoir ce que c’est !
Mr Tongue en anglais
[46:24] Traduction Jeanne : Ça aura lieu cette année car je fête mes 10 ans en Corée et j’essaie de travailler sur des projets qui marqueront le coup.
[46:30] Félix : Donc tu as déjà exposé en Corée et je sais que Jeanne a déjà assisté à tes expos. Désolé Jeanne, je te mets un petit coup dans le dos là…
Jeanne : Vas-y, vas-y !
Mr Tongue en anglais
[47:16] Traduction Jeanne : C’était une exposition appelée Inner Peace : New York. C’était une expo solo/duo. C’est à dire que c’était une exposition en solo mais avec 2 sujets, 2 concepts différents au même endroit. Une des salles était consacrée à ma paix intérieure et ma communication avec Dieu avec des pièces plutôt grand format. L’autre salle était dédiée à New York et à ma genèse, comment, pourquoi j’ai débuté ma carrière, la dureté de la culture que j’ai côtoyé à l’origine. L’exposition a été un grand succès.
Mr Tongue en anglais
[47:58] Traduction Jeanne : Cette année, il est certain que je n’exposerai pas mais peut-être l’année prochaine. Néanmoins, je ne suis pas pressé d’exposer dans une galerie parce que je le fais déjà dans la rue.
[48:07] Félix : Alors Jeanne, à quelle exposition as-tu assisté ? Elle est fan de ton travail, tu sais ! Désolé Jeanne, je te remets un petit coup de poignard dans le dos !
Jeanne : C’est ma fête ! Ouais, c’est vrai, y a 1 an à peu près, j’ai assisté à une exposition de graffiti dans la galerie EcoRock 에코락갤러리 dans le quartier de Shinsa 신사동 à Séoul. C’était vraiment pas mal mais c’était plusieurs artistes qui exposaient dans la même pièce. Puis, cette année, j’ai vu ton expo sur Instagram ton exposition Inner Peace et j’y suis allée car j’étais plutôt curieuse et au final, j’étais surprise de voir que c’était très différent de ce qu’on peut voir dans la rue. Tu avais préparé des explications écrites sur les différents tableaux et ça, c’était vraiment plutôt cool.
Mr Tongue en anglais
[49:21] Traduction Felix : Oui, c’est effectivement très différent. J’essaie de saisir l’opportunité d’exposer dans une galerie pour expliquer aux gens ce que représente mon art. Dans la rue, c’est beaucoup plus difficile. En une galerie, je peux capter l’attention des personnes, leur expliquer et communiquer mes raisonnements plus en profondeur. Certains s’attendaient à voir quelque chose de similaire que ce que je fais dans la rue et je leur ai répondu « Mais alors pourquoi faire une exposition dans une galerie, alors ça sert à rien, non ? ».
Mr Tongue en anglais
[50:20] Traduction Jeanne : Je voulais juste montrer un aspect différent de mon travail car je ne veux pas que les gens continuent à penser « Oh regarde, Mr Tongue fait ses graffitis dans la rue et puis c’est tout ». C’est aussi une des raisons pour lesquelles je ne dévoile pas mon visage au public : c’est parce que je veux être jugé sur mon art et pas sur mon apparence.
[50:37] Félix : Alors, pour conclure, aurais-tu un message ou des conseils à faire passer à la jeune génération de graffeurs en Corée ?
Mr Tongue en anglais
[51:35] Traduction Jeanne : Je dirais ce que tout monde dit. Maintenant, ça a un peu plus de sens pour moi de le dire : tu dois être persévérant et cohérent dans ce que tu fais. Même si tu n’obtiens pas les résultats espérés, tu dois rester patient. Pour moi, je commence à peine à récolter les fruits de mon travail depuis le début de cette année, et cela fait déjà 10 ans que j’ai commencé ma carrière . Certains ont la chance de voir des résultats plus tôt, après 2 ou 3 ans de travail mais pense que tu dois perfectionner ton art et être prêt lorsqu’une opportunité se présente car tu ne sais jamais si une autre occasion croisera ton chemin.
[52:06] Félix : Oulà et ben, alors, ça c’est un message de la fin spirituel et motivant pour tout le monde. Allez, on remercie bien sûr infiniment Mr Tongue pour être venu dans le Corée Voyage Show.
[52:15] Jeanne : C’est donc la fin de cette interview et nous vous invitons à jeter un œil sur l’Instagram de Mr Tongue. Son identifiant, c’est MysturTongue. Mais attention, c’est tout attaché et Mr est écrit M-Y-S-T-U-R . Il a également un site qui est lié à son Instagram où il vend certaines de ses œuvres ainsi que des vêtements, des masques, des bonnets qui représentent ses graffitis. Il envoie partout dans le monde alors, si vous voulez, n’hésitez pas. Et maintenant, on passe à notre rubrique Voyage où on vous a promis de vous amener dans un quartier incontournable de Séoul.
[52:56] Félix : Alors Jeanne, aujourd’hui, tu vas nous présenter un quartier qui s’appelle le quartier d’Insadong. C’est un quartier incontournable lorsqu’on vient à Séoul.
[53:03] Jeanne : Tout à fait, si vous venez visiter Séoul, vous êtes obligés de passer par Insadong. On dit le quartier Insadong, mais en général, c’est plutôt une rue, une assez longue rue. Effectivement c’est mieux si on part sur les côtés mais la rue d’Insadong en tous cas est très connue pour ses boutiques de souvenirs. Alors, à l’origine, c’était pas du tout le but de cette rue-là.
[53:24] Félix : Oui, d’ailleurs, pourrais-tu nous raconter la petite histoire de ce quartier ?
[53:28] Jeanne : A l’origine, ce n’était pas un quartier, mais 2 quartiers : le quartier In et le quartier Sa donc vous avez compris d’où vient le nom Insadong. Ils ont juste collé les 2 noms de quartiers : Insa et dong qui signifie le petit quartier en coréen.
[53:43] Félix : D’accord. Ce quartier a plusieurs particularités que tu pourrais peut-être nous expliquer.
[53:49] Jeanne : Insadong était un quartier résidentiel pour la noblesse et les officiers de la dynnastie Joseon. La dynastie Joseon c’était à partir de 1392 jusqu’en 1910. Ce quartier a vécu d’énormes transformations notamment dus à la colonisation japonaise, on est passé d’un quartier résidentiel à un quartier pour les antiquaires mais aussi pour les artistes.
[54:11] Félix : Il existe aussi en parlant de quartier résidentiel, au Nord du quartier d’Insadong, Bukchon Maeul 북촌마을, le village de Bukchon qui abritent plusieurs centaines de hanok ; hanok, c’est une maison traditionnelle coréenne mais à Bukchon, ces habitations ont été quelque peu modifiées, modernisées, restylisées. Mais désolé Jeanne, revenons à Insadong…
[54:29] Jeanne : Maintenant, la rue principale d’Insadong regroupe bon nombre de magasins, de salons de thé et de galeries d’art. Notamment 40 % des magasins d’antiquaires et galeries d’art en Corée se trouvent où ? Dans ce quartier. Il y a aussi la plus vieille maison de thé de Séoul et la plus vieille librairie.
[54:46] Félix : Oui, c’est aussi un quartier qui se transforme depuis quelques années. Alors on trouve des maisons de thé traditionnelles, mais on trouve également de plus en plus de lieux qui allient à merveille modernité et traditions.
[54:57] Jeanne : C’est exactement ça, Insadong représente la culture du passé et du présent, le mélange traditions modernité qui est vraiment propre à la Corée du Sud. Donc, on peut tout à fait manger dans un restaurant de style hanok, hanok, ce sont les maisons traditionnelles coréennes puis on sort de ce restaurant aller directement dans un centre commercial. Alors, faut pas avoir peur, quand on dit centre commercial, c’est pas un immense centre commercial comme on les connaît en France, c’est un petit centre commercial qui s’appelle SSamjigil 쌈지길 et qui est plutôt très sympa.
[55:25] Félix : En parlant de petit centre commercial, ça me fait penser qu’il y a également un lieu assez atypique qui s’appelle "Nagwondong Agki Sangga" 낙원동악기상가 qui est une grande galerie marchande qui abrite un nombre impressionnant d’instruments de musique : trompettes, guitares, batteries, pianos… etc. Amoureux de la musique, c’est endroit est fait pour vous. Une autre particularité d’Insadong, faut savoir que c’est un quartier qui a la côte auprès des étrangers et des touristes, c’est parfois très fréquenté avec des rues qui sont bondées, en particulier, la rue principale ou l’axe principal.
[56:55] Jeanne : Tout à fait, c’est bondé le week-end mais la mairie de Séoul a fait quelque chose d’assez sympa, maintenant c’est interdit pour les voitures de traverser cette rue en week-end. C’est un des 1er quartiers comme ça qui a barré ses routes aux voitures le week-end. Maintenant, y en a un petit peu plus.
[56:10] Félix : Encore une fois, ça me fait penser à quelque chose, mais qui n’est pas forcément lié à ce dont on était en train de parler mais je conseille à toutes celles et ceux qui se rendent à Insadong d’essayer le hottokk. Le hottokk, c’est un beignet frit à la cannelle, au miel, aux arachides et c’est très très bon. Vers la fin de l’automne, début de l’hiver arrêtez-vous à mi-chemin quand vous marchez dans la rue principale et vous tomberez forcément sur une vendeuse de ce fameux beignet. C’est assez facilement identifiable car en général, y a une queue monstrueuse.
[56:41] Jeanne : Alors, on pourrait se dire, mais un quartier comme ça qui est super connu où y a vraiment beaucoup de monde, c’est un peu attrape-touristes. T’en penses quoi Félix ?
[56:48] Félix : Alors, attrape-touristes oui, c’est certain, y a des magasins qui l’affichent clairement. Cependant, il existe un bon nombre de boutiques qui proposent des objets d’art coréen, fabriqués en Corée.
[56:59] Jeanne : Moi, c’est ce que j’apprécie dans ce petit quartier, dans cette petite rue, c’est qu’on retrouve quand même pas mal d’artisans, plus qu’ailleurs peut-être. Tout est assez concentré et ça sera beaucoup plus facile d’aller acheter chez un petit commerçant qui crée ces propres objets ou en tous cas, qui crée des choses plutôt traditionnelles.
[57:18] Félix : Oui, c’est vrai qu’on retrouve des créateurs coréens qui ont leur magasin dans Insadong et qui comme tu le disais précédemment, il vaut mieux s’éloigner de l’artère principale qui est très fréquentée et plutôt s’orienter vers les rues et petites ruelles adjacentes où vous trouverez ces petits coins un peu cachés.
[57:36] Jeanne : Et quand bien même vous restez dans l’artère principale, il y a plein de petits magasins qui vendent des objets traditionnels très peu chers, ça c’est assez appréciable. Il y a de quoi satisfaire tous vos proches quand vous rentrez de vacances.
[57:49] Félix : Voilà, pour acheter vos souvenirs, vous faites un petit arrêt à Insadong avant de repartir et de prendre l’avion et c’est parfait.
[57:55] Jeanne : D’ailleurs, toi Félix, quand tu rentres en France, quels souvenirs tu aimes bien acheter ?
[57:59] Félix : Alors, moi, j’aime bien acheter les petits marque-pages coréens traditionnels qui sont très sympas, superbes, magnifiques ; on tient à le dire. Ensuite, j’ai aussi des demandes spécifiques comme des porte-monnaie en cuir avec des imprimés représentant des scènes d’une fête traditionnelle coréenne appelée "Dano" 단오, célébrée lors du 5ème jour du 5ème mois lunaire et pendant laquelle la coutume était de participer à des jeux comme la balançoire, la lutte coréenne, le tir à l’arc et d’autres activités. Mais revenons à nos moutons Jeanne. De ton côté, quels sont les souvenirs que tu ramènes en France ?
[58:31] Jeanne : Moi en général, j’achète des chaussettes.
Félix : Des chaussettes?! D’accord, mais pourquoi des chaussettes ?
[58:39] Jeanne : Déjà, il faut savoir que les chaussettes coréennes elles sont très peu chères. Bon évidemment, c’est pas ça qui fait la qualité du cadeau mais elles sont de super bonne qualité et surtout, elles sont très très mignonnes.
[58:52] Félix : D’accord, elles sont mignonnes mais dans quel sens, quelle est la particularité de ces chaussettes ?
[58:56] Jeanne : Y a plein de dessins dessus. Vous pouvez trouver des petits animaux, vous pouvez trouver des stars de K-pop en dessin, vous pouvez trouver des billets de 50 mille wons, la monnaie la plus forte de Corée. Vous pouvez aussi trouver la tête d’Obama par exemple ou celle de Trump sur les chaussettes. Y a un peu de tout et n’importe quoi, en tous cas, elles font bien rigoler les gens. On s’en sert, c’est toujours un cadeau très pratique et la seule fois où je n’en est pas ramené à mes proches, je me suis limite fait engueuler. C’était le drame. Ils étaient perdus. Mais où sont mes chaussettes, où sont nos chaussettes ?
[59:31] Félix : D’accord, je vois, c’était l’incident diplomatique ! Allez Jeanne, le mot de la fin, c’est parti.
[59:35] Jeanne : Que ça soit pour manger, pour juste boire un petit café, faire une pause lors de vos visites, n’hésitez pas à passer par la rue Insadong.
[59:42] Félix : Et oui, surtout si vous cherchez des chaussettes.
[59:45] Jeanne : Voilà, c’est ça ! C’est la fin de cet épisode. On espère que vous avez aimé et surtout, n’hésitez pas à réagir sur tous nos réseaux sociaux et notamment sur Twiter. Le nom de notre Twiter, c’est coreevoyage tout attaché. On félicite aussi MimiJa qui a trouvé la bonne réponse à notre quizz de la semaine dernière. C’est dans le film, "Le jeu de la mort" avec Bruce Lee, qu’aurait dû apparaître Beopjusa 법주사 et sa pagode. Malheureusement, Bruce Lee est décédé pendant le tournage et Beopjusa a été coupé au montage. Et sur ce, on vous souhaite une très bonne semaine.
[60:21] Félix : On remercie tout le monde de suivre le Corée Voyage Show, n’oubliez pas de vous abonner sur Google Podcasts, Apple podcasts, Deezer, Spotify pour ne manquer aucun épisode. Tous les liens mentionnés dans cet émission sont inclus dans la description. Allez, on revient très bientôt et d’ici-là, prenez bien soin de vous. 들어가십시오!